La peine de mort infligée aux
criminels peut être envisagée à peu près sous le même point de vue : c’est pour
n’être pas la victime d’un assassin que l’on consent à mourir si on le devient.
Dans ce traité, loin de disposer de sa propre vie on ne songe qu’à la garantir,
et il n’est pas à présumer qu’aucun des contractants prémédite alors de se faire pendre.
D’ailleurs tout malfaiteur attaquant le droit social devient par ses forfaits rebelle et traître à la patrie, il cesse d’en être membre en violant ses lois, et même il lui fait la guerre. Alors la conservation de l’Etat est incompatible avec la sienne, il faut qu’un des deux périsse, et quand on fait mourir le coupable, c’est moins comme citoyen que comme ennemi. Les procédures, le jugement, sont les preuves et la déclaration qu’il a rompu le traité social, et par conséquent qu’il n’est plus membre de l’Etat. Or comme il s’est reconnu tel, tout au moins par son séjour(1), il doit en être retranché par l’exil comme infracteur du pacte, ou par la mort comme ennemi public ; car un tel ennemi n’est pas une personne morale, c’est un homme, et c’est alors que le droit de la guerre est de tuer le vaincu. SUITE |
1.Voir livre IV, chapitre II, p. 115: " Quand l'Etat est institué, le consentement est dans la résidence; habiter le territoire c'est se soumettre à la souveraineté."
Michel Onfray déboulonne Rousseau |